jeudi 20 mars 2008

Cacapitalisme

Quand j'y pense, j'ai de la peine. C'est comme si nous étions les arbres d'une foret tropicale, et qu'il fallait se battre pour la lumière. La lumière pour les arbres, c'est la vie ; mais pour nous, qu'est ce que c'est?

Apparemment ça n'est ni l'eau ni la nourriture, ça n'est pas non plus un toit et de quoi se protéger des éléments hostiles, ni le confort élémentaire de l'homme moderne c'est à dire une télévision, un lave linge et un aspirateur. Parce qu'il faudrait une crise économique majeure pour que ces basiques disparaissent.

Ca n’est pas vraiment habile de ma part de démarrer par cet exemple. C’est qu’au départ, j’insinue que dans cette lutte à la lumière, les ressortissants de chaque pays sont responsables des valeurs et des buts qu’on choisit leurs sociétés. Or il est évident que ça n’est pas le cas. Si aujourd’hui nous sommes dans l’ère de la démocratie et du vote, notre part de décision est restreinte à des propositions. Ces propositions naissent, et sont crées pour répondre, paraît-il, a des impératifs (qui tournent autour de la guerre économique), et à une amélioration de notre quotidien. Ce qui est étonnant ou plutôt ce qui m’étonne, c’est que les gens puissent accepter de se voir restreindre leurs libertés à du pré-mâché, et puissent se laisser berner par l’air grave de nos politiciens.

Je sais bien que juger n’est pas facile, car il s’agit de choisir et d’émettre un jugement de valeur en même temps. Or comment choisir, si nous ne pouvons pas sortir de notre propre représentation du monde. Pour juger, il faut au moins pouvoir comparer. Cette impossibilité de sortir de cette simplification de l’existence vient de plusieurs phénomènes, dont je ne ferai pas de liste exhaustive maintenant. C’est qu’ici mon but n’est pas de critiquer les individus, mais la responsabilité des pouvoirs, et humaines en tant qu’espèce.

Le principal responsable peut-être, est la télévision, qui est mon dieu, parce qu’à toute heure c’est le son rassurant du ronron du monde, le bruit de la fourmilière et je sais que c’est une vérité ; que je sois la ou non, il ne s’arrêtera pas. C’est ainsi que je rythme ma vie, et que se forme l’image que j’ai du monde. Un univers qui s’arrête confortablement aux frontières humaines, et qui oublie les nombreux mystères que propose l’existence, donnant à l’avance des valeurs et exemples type, qui répondent aux questionnements humains. Evidemment, seule n’est pas en cause la télévision. Les choix éducatifs, et l’ensemble des autres médias s’ajoute à ce qu’on pourrait appeler propagande.

Si propagande il y a, c’est que derrière se cache un but et donc des valeurs (ou l’absence de valeur, ce qui dans un sens est la même chose, puisque c’est la volonté de puissance et donc de dominer qui surgit du nihilisme. Or si la domination ne peut pas être une valeur, elle peut être au moins une règle, et donc un but.). Le fait est qu’il est difficile de savoir si à l’intérieur de notre système capitaliste, se cache un but autre que l’expansion économique et de l’éternel jeu de dominé/dominant très divertissant je l’admets mais parfaitement idiot, puisque non seulement il suscite une incroyable quantité d’énergie, mais parce qu’il ne mène nulle part. Il semble à ce sujet décevant de penser, que la propagande en question n’ait pas d’objectifs grandioses, mais l’idée simple de régir le monde de façon à faire le plus de profit possible. Argent étant synonyme de pouvoir, il s’agit donc de régner. Je pense à Aldous Huxley ou à George Orwell et à leurs romans d’anticipations et je dois admettre que leurs scénarios restent incroyablement pertinents aujourd’hui.

Quelle est le réel but de ce message ? Simplement de dénoncer un système qui ne nous laisse que le choix d’une vie individuelle. Individuelle puisque sans sens. Il n’y aura jamais de vraie solidarité tant que nous serons dans une optique de plaisir personnel. Et je ne vois pas comment combattre l’individualisme dans notre situation actuelle. Il s’agirait de demander aux gens de croire en des valeurs qui ne reposent sur rien. Des coquilles creuses. Nous voilà face au monde absurde dont parle Camus, et aux solutions de notre époque. L’abandon de tout espoir d’immortalité et donc d’espoir (Dieu est mort). Pourquoi alors penser plus haut que son propre plaisir ? Pourquoi aller au-delà de sa propre vie ? Je ne le sais pas moi-même, je ne peux que constater la décadence et les paradoxes dans lesquelles nous sommes tombés.

11 commentaires:

Anonyme a dit…

You're so clever... ton dernier paragraphe est vraiment intéressant, je ne sais pas si cette idée selon laquelle l'individualisme résulte de la mort de Dieu est la tienne (je n'ai aucune culture philosophique), si c'est une banalité ou si au contraire c'est loin d'être démontré, en tout cas je trouve ton article lumineux.
J'ai rêvé de toi la nuit dernière, un de mes rêves affreux (tu avais perdu une jambe), du coup j'ai pensé à toi tout le lendemain.
Tu es toujours en train de récolter? Tu devrais lire Les Raisins de la colère (The Grapes of Wrath).
Je t'embrasse, écrivain en herbe
Claude

Anonyme a dit…

L'homme est un animal doté de la conscience de sa propre existence, donc de sa condition de mortel. Il est donc soumis à deux types de besoins, l'un strictement matériel et que nous partageons avec la faune et la flore, et l'autre spirituel, moteur des multiples interrogations qui semblent peupler ce blog...
A mon sens nos sociétés actuelles n'ont pas d'autre objectif que de répondre à notre besoin primaire de possession, objectif extraordinairement bien rempli quand on voit l'amélioration spectaculaire des conditions de vie depuis quelques décennies.
L'erreur de nos sociétés est qu'aveuglées par leurs succès elles s'imaginent répondre à tous les maux humains, négligeant l'essentiel, la solitude face à l'absurdité de l'existence et la mort.
Hier on soutenait les masses à grand renfort de religion. La révolution a entrepris de détruire tous les carcans et de donner à chacun le pouvoir de disposer non seulement de soi-même, mais aussi de sa conscience... par sûr que ce dernier point rende les gens plus heureux!

Néanmoins il ne faut pas oublier que si le monde dans lequel on vit n'offre pas de réponse et pas de perspective d'un point de vue spirituel il offre la possibilité de chercher et d'exprimer librement sa voie, richesse que bien peu d’hommes ont eu par le passé.

Enfin tout ça pour dire que si le matérialisme et l’individualisme qui nous entourent sont bien souvent insupportables de bêtise et d’ignorance (as-tu lu « la nausée » de Sartre ?), pas sûr que la société que tu abhorres soit le coupable idéal de tes angoisses existentielles. Contrariante, oui !
Simon

Zion a dit…

Je ne cherche pas de coupable, je suis simplement triste de voir que nous n'allons nulle part. Et je porte ma souffrance avec fierte parce qu'elle fait partie d'un lot de verites que j'accepte sans contrefacon. Au passage j'annonce mes valeurs. J'ai une idee de ce qu'est un Homme ou un adulte qui est bien loin des dechets pretentieux qui me donne la gerbe des que j'allume la tele. Adulte, aujourd'hui c'est etre independent . Je chie sur la thune et sur l'independance. Je veux pouvoir croiser des gens et partager autre chose que des banalites parce qu'on va tous crever. Et que c'est ca le principe de l'egalite fraternite. Tu dis au debut que d'etre un etre humain c'est d'avoir conscience de sa mort. Bullshit. Pour la grande majorite les gens ne prennent conscience de leur mort que tres tard. Je me declare humain au milieu de presque-humain alors, puisqu'ils ne sont meme pas capable de s'apercevoir de la valeur de la vie. De sa richesse, de sa pauvrete, de sa rarete. Si j'abhorre nos societes, ca n'est pas pour me sauver en donnant corps a mes peurs et mes angoisses, mais tout simplement parce qu'elles me respectent pas la vie. Et ca je ne pardonnerai pas.

Zion a dit…

"La révolution a entrepris de détruire tous les carcans et de donner à chacun le pouvoir de disposer non seulement de soi-même, mais aussi de sa conscience... par sûr que ce dernier point rende les gens plus heureux!"


Une derniere chose : la revolution francaise arrive apres une longue periode de revolution metaphysique qui demarre dans la litterature avec Sade puis les romantiques, et qui continue apres pendant le 19eme siecle. Rimbaud, les surrealistes, Dostoievski, et puis les grands penseurs comme Hegel et Nietzsche dont se sont inspires les instigateurs des grands massacres du 20eme siecle, cherchant a creer rationnellement ou irrationnellement le royaume de Dieu, a jamais perdu ; sur Terre. Il s'agissait d'abord de declarer Dieu coupable des souffrances humaines, de le detroner mais non de le tuer. Meme apres le meurtre symbolique de Louis XVI, Dieu n'etait pas encore nie. Les valeurs, la morale sont encore haut perche dans le ciel et intouchable ; jusqu'a Stirner et puis Nietsche, qui s'attache a detruire toute forme de valeurs qu'ils declarent etre le visage du Dieu dechu. Periode d'ultra-nihilisme qui survient alors et dont nous ne sommes toujours pas sorti. Il s'agit de faire face a l'absurde de l'existence et d'en tirer parti.

Ce que je voulais exprimer, c'est que nous sommes face a une situation ou tout est a constuire. Nous vivons dans un monde qui est depourvu de valeur absolu ; nous ne pouvons nous fier qu'a nous et a notre raison imparfaite, a notre vision imparfaite et a une mort inevitable. La solution alors doit-elle etre la fuite? Un asservissement aux instincts et au desir? Une croyance irrationnelle en la science dont on espere en secret qu'elle nous sauvera?

Ce sont certes mes propres problemes existentiel que je pose ici, mais ce sont aussi ceux des exigents. Je n'en veux pas a la societe car ce serait lui conferer le pouvoir de ses decisions. Je vois nos dirigeants perdu et en plein pathetique. Soumis aux memes addictions que nous tous. A l'image, au pouvoir. Avide d'exister et qui pour jouir de se sentiment s'agite, mais pour rien. Depasses. Toujours soumis aux memes contradictions. Mais n'y pensons pas, un bus hier est sorti de la route et 32 personnes sont mortes. Un meurtrier a encore sevit dans la Creuse et 15 temoignages de trous du culs que j'ai envie de buter. Camus disait que les gens sont plus paresseux que lache, moi je crois que les gens sont laches, et que tous nos problemes viennent du fait qu'on n'est pas capable d'assumer notre condition. On ne constuira rien d'humain, on ne sortira pas de l'absurde sans se serrer les coudes.

Tu disais ; l'homme est un animal conscient. Alors si on ne veut plus etre animal, soyons juste conscient. C'est de la que nait l'amour, l'espoir et la solidarite. C'est de la que nait le futur. Utopie evidemment, mais qu'y puis-je, je ne cesse d'esperer.

Anonyme a dit…

Au final nous avons un ressenti commun mais pour ma part j'ai du mal à comprendre ta misanthropie; solidarité, fraternité, mépris, haine?.. tout cela est-il bien compatible? En tout cas tu serais pas pote avec Jésus hahaha.

Au passage voilà un passage qui à mon avis est complètement faux:
"Pour la grande majorite les gens ne prennent conscience de leur mort que tres tard. Je me declare humain au milieu de presque-humain alors, puisqu'ils ne sont meme pas capable de s'apercevoir de la valeur de la vie."
Revu et corrigé à ma sauce:
La grande majorité les gens, trop conscients de leur propre mort, s'évertuent à l'oublier pour ne pas succomber sous le poids de leurs propres angoisses.

Et dernière chose. Je n'ai certes pas ta culture sur les courants d'idées pré-révolutionnaires, mais une chose est sûre, c'est qu'ils ne concernaient à ce moment que les élites... Dans mon esprit, c'est la révolution qui a initié la fin du pouvoir intemporel mais peut-être que je me trompe. Faudrait demander à un historien.

A+
Simon

Zion a dit…

Salut frangin

Au passage voilà un passage qui à mon avis est complètement faux:
"Pour la grande majorite les gens ne prennent conscience de leur mort que tres tard. Je me declare humain au milieu de presque-humain alors, puisqu'ils ne sont meme pas capable de s'apercevoir de la valeur de la vie."
Revu et corrigé à ma sauce:
La grande majorité les gens, trop conscients de leur propre mort, s'évertuent à l'oublier pour ne pas succomber sous le poids de leurs propres angoisses.


La base de la conscience est la memoire. L'oublie serait donc l'inconscience. Une inconscience qu'avec l'age on ne peut plus soutenir ; la realite qu'on s'est, comme tu dis, evertue a “omettre”, ressurgit implacablement. De toute facon, je ne voulais pas dire que pour meriter le “titre” d'Homme, il faille se laisser aller a penser jours et nuits a la mort.

C'est cette devaluation de la vie qui m'attriste, ce manque de respect envers ce que nous avons de plus precieux. L'habitude, le confort (surtout intellectuel) sont mes ennemis parce qu'ils nous laissent froids devant ce que qui devrait nous etonner. Aujourd'hui qu'est ce qui nous etonne? Plus grand chose. Nous avons tout vu. La vie, le miracle, ce qu'il en reste, ce sont des voyages touristiques et des attractions, des parcs naturel et des visites guides. Un brin de nostalgie. On s'etonne devant une nouvelle race de chauve-souris, et devant une montagne particulierement impressionnante. Mais pas devant un pigeon ou devant une petite cuillere, qui ma foi, sont tout aussi incroyables. Evidemment on ne peut pas etre constamment entrain d'hallucine sur l'etrangete du monde (et de son propre corps), mais ils me semblent que de temps en temps ca permet au moins de re-penetrer l'epaisseur de la vie, et d'oublier un temps le monde de bisounours vers lesquels les pubs et les medias veulent nous plonger. Je suis parfois dans la rue des gens et je les ecoute parler pour savoir ce qu'ils se disent quand je suis pas la. C'est decevant tu t'en doutes. Pour moi ils sont deja mort, je ne concois pas l'existence sans l'etonnement.

Je ne suis pas misanthrope, je suis peine et blesse par l'arrogance et le serieux d'une grande majorite de gens que je peux rencontrer ; je n'ai rien d'ailleurs contre la pretention, mais ne peut on pas pretendre en toute humilite? Le fait est qu'il me semble, que lorsque l'on pretend il faut etre pret a s'exposer a la critique. Aujourd'hui les gens s'expriment en direct, devant une majorite de leur communeaute sans gene. Quoi qu'ils disent, que ce soit inconscequent ou non, ils sont content parce que tout le monde les voit. Je trouve ca indigne d'afficher sa misere. Indigne envers soi-meme. Je parle aussi de tous les hommes en cravate qui prennent des airs tres serieux pour dire souvent des trucs tres ininteressant. Ils sont surs d'eux alors qu'ils sont pathetiques, et c'est une caracteristique ultra courante aujourd'hui. Les gens sont contents d'eux pour un rien.

J'aime bien Matrix. Le film propose une problematique vieille comme le monde mais tout a fait d'actualite : peut on sacrifie le bonheur pour la verite? Ca doit etre un choix personnel je suppose, le fait est qu'il me semble que d'etre en vie a un prix, et que nous pourrions peut-etre aguiyer les gens vers une vie spirituelle plus complexe. La derniere fois, j'ai dis que l'amour decoulait de la conscience, j'entends, la compassion au moins, puisque se connaitre soit meme c'est aussi connaitre les autres.

Bref bref bref.. J'ai du mal a ecrire un truc qui se tient. Je tenais a dire simplement que je ne cherche pas l'utopie, j'aime le chaos et l'epaisseur humaine, et peut etre que je me trompe, mais ce que tu prends pour de la haine n'est que de l'intransigeance.

Anonyme a dit…

Et merci pour le bonjour à ta soeur ! Heureusement que je ne me vexe pas si facilement :)

Zion a dit…

j'allais t'envoyer un mail gredine!

Anonyme a dit…

Hello

Suis assez en phase avec ton dernier post (même si je me balade en costard cravate); c'est marrant il me fait penser au film "American Beauty" qu'on a vu avec maman à Toulouse récemment.
Salut (et coucou Claude!)

Simon

Anonyme a dit…

HAPPY BIRTHDAY !!!!

Anonyme a dit…

eh ben moi j'espere qu'on peut bien conjuguer le bonheur et la vérité.
Je ne veux en sacrifier aucun des deux, moi!
soeur n°4